La campagne de Virginie
Le Lord Charles Cornwallis, commandant de l’armée britannique du sud de l’Amérique, avait remporté une série de victoires impressionnantes dans les Carolines en 1780, culminant avec la défaite écrasante du Maj. Gen. Horatio Gates à la bataille de Camden (16 août 1780). Les Américains remplacent rapidement Gates par le major général Nathanael Greene, qui engage Cornwallis dans une série de batailles sanglantes qui réduisent considérablement les forces britanniques. Une partie de l’armée de Greene, sous les ordres du général de brigade Daniel Morgan, inflige un revers cuisant à une force britannique supérieure lors de la bataille de Cowpens (17 janvier 1781). Cornwallis est bientôt contraint d’abandonner la campagne de Caroline et décide d’un mouvement vers la Virginie, où le soutien naval pourrait être utilisé à meilleur escient.
Pendant ce temps, sur la rivière James, Benedict Arnold (alors sous allégeance britannique) avait ravagé la campagne. À la demande du commandant américain, le général George Washington, l’escadron naval français de Newport, Rhode Island, s’était dirigé vers le Chesapeake. Après une action indécise avec une escadre britannique (mars 1781), les Français retournent à Newport. Cornwallis rejoint Arnold le 20 mars, à Petersburg, avec l’intention d’entreprendre de vigoureuses opérations offensives en Virginie. Le commandant en chef britannique Sir Henry Clinton, qui se trouve à New York, estime que les forces disponibles sont insuffisantes pour une telle entreprise et ordonne à Cornwallis de se retrancher dans une position forte qui contrôlerait le mouillage d’une flotte. Cornwallis s’exécute en se rendant à Yorktown, en Virginie, où il arrive le 22 août avec 7 000 hommes. Il y attendit des renforts et un réapprovisionnement par voie maritime.
Washington pensait que la puissance navale française était la clé pour mener à bien le conflit en cours. Après avoir observé les Britanniques évacuer Philadelphie en 1778 simplement à cause de l’arrivée probable d’une flotte française supérieure, Washington n’entreprit que des opérations terrestres mineures pendant près de trois ans, tenant son armée prête à une action conjointe avec une flotte, qu’il recherchait constamment. Lorsque l’amiral François-Joseph-Paul, comtede Grasse, arrive aux Antilles en provenance de France en avril 1781, il a pour ordre de coordonner ses opérations avec Washington. Échangeant des messages par frégate rapide, le général et l’amiral concoctèrent un plan pour une jonction de la flotte et des armées dans une action contre les Britanniques dans la partie inférieure de la baie de Chesapeake. Après l’arrivée de Cornwallis à Yorktown, sa base devient l’objectif principal des forces militaro-navales franco-américaines.
Une force française de quelque 6 000 hommes sous les ordres du comte de Rochambeau rejoint Washington au nord de New York, et les deux marchent vers le nord de la baie de Chesapeake. Dans le même temps, de Grasse quitte sa base à Haïti, emmenant au nord sa force complète de 28 navires de ligne et 3 300 soldats. Pendant ce temps, l’amiral Samuel Hood de la flotte britannique des Antilles s’inquiète de la sécurité de New York. Hood part vers le nord cinq jours après de Grasse, avec 14 navires de ligne. Avec des navires plus rapides et suivant une route plus directe, Hood est le premier à atteindre la baie de Chesapeake. Ne trouvant aucun signe des Français, il se hâte vers la protection de New York, où il est rejoint par cinq navires de ligne sous les ordres de l’amiral Thomas Graves. En tant qu’officier supérieur, Graves prend le commandement de toute la force. Les Britanniques reçoivent bientôt la nouvelle que huit navires de ligne sous les ordres de l’amiral Jacques-Melchior Saint-Laurent, comte de Barras, ont quitté Newport. Supposant à juste titre que cet escadron se dirigeait vers la baie de Chesapeake, Graves appareilla avec ses 19 navires capitaux suffisamment tôt pour l’intercepter.
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