Dysmorphologie

David W. Smith, pédiatre et généticien clinique, a inventé le terme dysmorphologie dans les années 1960 et a joué un rôle majeur dans le développement de ce domaine d’étude spécialisé, qui se consacre à la découverte de la pathogenèse des anomalies congénitales humaines. Son travail dans le domaine de la dysmorphologie a été déterminant dans le tri des nombreuses causes différentes du handicap cognitif.

Parce que les anomalies physiques sont des indicateurs d’erreurs qui se produisent pendant le développement embryologique, leur étude améliore la compréhension des insultes génétiques et tératogènes à la morphogenèse humaine. La reconnaissance de nouveaux syndromes, sur la base de leurs caractéristiques physiques spécifiques, a conduit à l’identification des gènes responsables, aux découvertes des mécanismes par lesquels ces gènes provoquent les troubles, et au rôle qu’ils jouent dans l’embryogenèse normale.

Le rôle de la dysmorphologie dans la caractérisation de centaines de syndromes associés à un handicap cognitif suggère qu’elle peut également être un outil utile pour aider à clarifier l’hétérogénéité (trouble unique avec de nombreuses causes) au sein de l’autisme.

Les anomalies ou malformations physiques sont classées comme majeures ou mineures. Les malformations majeures sont peu fréquentes, affectent une structure médicalement importante comme le cœur, les reins ou le palais, et infligent un fardeau médical important. Les malformations mineures, en revanche, sont fréquentes dans les populations et n’ont aucune conséquence médicale grave. Mais prises ensemble, les malformations mineures peuvent servir d’indicateurs d’une morphogenèse altérée qui s’est produite au début de la gestation.

Les exemples courants d’anomalies mineures comprennent un philtrum plat, une lèvre supérieure mince, des ongles anormaux et un pli palmaire unique. Un examen de dysmorphologie consiste en un examen minutieux par une personne formée à la reconnaissance des altérations des structures physiques et à leur interprétation, y compris les conclusions sur leur cause, leur chronologie, leur base embryologique et leur signification médicale et diagnostique.

Pertinence pour l’autisme :

Un certain nombre d’études menées dans les années 1970 et 1980 ont rapporté que les enfants autistes présentaient des caractéristiques physiques hors norme1,2,3,4,5,6,7. Des études plus récentes ont également révélé que les enfants autistes sont plus susceptibles de présenter des anomalies mineures que les témoins normaux ou les frères et sœurs8,9. Bien que ces rapports aient permis de conclure que les enfants autistes présentent souvent des anomalies mineures, des résultats similaires chez les enfants atteints de troubles psychiatriques et de difficultés d’apprentissage indiquent que la présence d’anomalies physiques mineures n’est ni spécifique ni sensible au diagnostic d’autisme.

Récemment, on a constaté un regain d’intérêt pour les caractéristiques physiques de l’autisme, dans l’espoir qu’elles pourraient fonctionner comme des biomarqueurs avec lesquels on pourrait subdiviser les individus atteints du trouble en groupes pour les études génétiques. Une étude réalisée en 2000 a noté qu’environ 20 % des enfants autistes présentent un nombre important d’anomalies physiques compatibles avec un développement embryologique anormal10. Par la suite, les mêmes chercheurs ont décrit la subdivision naturelle des troubles du spectre autistique en deux groupes, l’autisme complexe et l’autisme essentiel11.

L’autisme complexe est défini par la présence d’un nombre important d’anomalies physiques ou de microcéphalie (circonférence de la tête inférieure à deux écarts-types par rapport à la moyenne), alors que dans le groupe de l’autisme essentiel, il n’y a pas de preuve de morphogenèse anormale. Les sous-groupes essentiel et complexe semblent être distincts sur le plan étiologique et diffèrent dans leurs résultats, leurs risques de récurrence, leur sex-ratio et leurs histoires familiales.

La distinction entre l’autisme complexe et l’autisme essentiel est recommandée comme une première étape nécessaire lorsqu’on s’efforce de subdiviser l’autisme en sous-groupes homogènes sur le plan causal. La définition de sous-groupes homogènes au sein du diagnostic de l’autisme est utile à la fois pour les soins cliniques et pour faire avancer la recherche sur l’autisme. Sur le plan clinique, la définition de sous-groupes d’autisme homogènes est la clé d’un pronostic plus précis, du conseil génétique et du développement de traitements plus efficaces spécifiques à chaque sous-groupe. Les chercheurs ont besoin de moyens pour sélectionner des sous-ensembles homogènes d’autisme à étudier, afin de réussir à identifier des causes spécifiques, des biomarqueurs pour une identification précoce et, éventuellement, des remèdes.

Mesure de la dysmorphologie de l’autisme:

La mesure de la dysmorphologie de l’autisme est une mesure de la dysmorphologie généralisée développée par Judith Miles, pédiatre, généticienne médicale et dysmorphologue. L’ADM, qui est utilisé pour classer les personnes autistes comme non dysmorphiques ou dysmorphiques, évalue la structure physique de 12 parties du corps12. Il a été créé en réponse au besoin d’une mesure de la dysmorphologie qui pourrait être remplie par des cliniciens n’ayant pas une formation approfondie en dysmorphologie et qui conserverait néanmoins un niveau élevé de sensibilité et de spécificité.

La mesure est destinée à compléter l’examen médical général et à améliorer la détection des causes connues de l’autisme, telles que les troubles chromosomiques, le syndrome de Timothy, le syndrome de Cornelia de Lange et d’autres troubles de l’autisme associés à une embryogenèse anormale.

Dysmorphologie informatisée:

Un complément récent à l’examen standard de dysmorphologie est l’évaluation informatisée de la taille et des formes des caractéristiques physiques. Des images faciales tridimensionnelles (3D), prises en moins d’une seconde avec un système d’imagerie 3D disponible dans le commerce, sont présentées numériquement pour analyse. Les repères faciaux sont placés avec précision et des centaines de mesures faciales précises sont générées pour être analysées à l’aide d’un logiciel informatique dédié.

L’imagerie 3D est principalement utilisée dans la recherche sur l’autisme, où elle a fourni une analyse faciale quantitative suggérant la présence d’un certain nombre de phénotypes faciaux avec des corrélats cliniques et comportementaux spécifiques13. Le système 3dMD est couramment disponible pour une utilisation clinique dans les blocs opératoires, ce qui indique que cet outil de recherche pourrait bientôt être ajouté à la boîte à outils de la dysmorphologie clinique.

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