Les sources primaires parlent le plus souvent des insulae en faisant référence à leurs dangers. On trouve de multiples références aux dangers de vivre dans les insulae au sein de textes tels que les satires et les histoires. Il semble que les principaux dangers de la vie dans les appartements romains étaient l’incendie et l’effondrement. Il est également arrivé que des bâtiments soient intentionnellement démolis et leurs habitants déplacés. Catulle fait l’éloge satirique de Furius, un mendiant, parce qu’il n’a rien à craindre puisqu’il ne possède rien :
…tu ne crains rien, ni le feu, ni les lourds effondrements, ni les méchants vols…
Catulle dans cette ligne fait très probablement référence aux incendies, effondrements et cambriolages incessants qui tourmentaient les propriétaires et les locataires de maisons. Ici, Juvénal fait la satire de l’instabilité du logement romain lorsqu’il dit :
Mais ici nous habitons une ville soutenue pour la plupart par de minces étais car c’est ainsi que l’huissier soutient la maison chancelante, colmate les fissures béantes du vieux mur, offrant aux habitants de dormir à l’aise sous un toit prêt à s’écrouler sur leurs oreilles…. la fumée s’échappe de votre grenier du troisième étage, mais vous n’en savez rien ; car si l’alarme commence au rez-de-chaussée, le dernier homme à brûler sera celui qui n’a rien pour l’abriter de la pluie que les tuiles, où les douces colombes pondent leurs œufs.
Bien qu’il s’agisse probablement d’exagérations, cela indique que l’on pouvait voir de grands appartements autour de Rome maintenus par des étais en bois avec des rustines appliquées sur les murs de boue qui s’effritent, les étages les plus élevés étant les plus dangereux car les plus difficiles à fuir. Aulus Gellius observe l’appréhension d’un ami à acheter des immeubles dans la ville en raison de la fréquence des incendies:
Nous, ses amis, l’entourant de tous côtés, l’accompagnions chez lui quand, en montant la colline de Cispian, nous vîmes, d’où nous étions, une certaine insula, avec de nombreux étages élevés attaqués par le feu. Tout ce qui se trouvait à proximité brûlait déjà dans une grande conflagration. Un ami de Julianus dit alors : » Les bénéfices des propriétés urbaines valent beaucoup, mais ils sont largement dépassés par les dangers. Mais si quelqu’un pouvait mettre au point un remède pour que les domus à Rome ne brûlent pas si assidûment, alors, par le ciel, je mettrais en vente mes propriétés à la campagne et j’achèterais en ville. »
Bien qu’un ambitus, ou allée, entourait les bâtiments et que les murs mitoyens étaient illégaux pour aider à atténuer les dommages causés par le feu, la taille minimale d’un ambitus ne doit être que de 70 cm, soit assez de place pour qu’une personne puisse marcher. L’ambitus est plus équivalent à une allée et les incendies sautaient rapidement aux bâtiments adjacents.
Dans une lettre à Atticus, Cicéron rapporte qu’une des insula qu’il possède s’est effondrée:
…deux de mes boutiques sont tombées et le reste se fissure. Ainsi, non seulement les locataires mais les souris mêmes ont migré. Les autres appellent cela un malheur, moi je n’appelle même pas cela une nuisance. Oh Socrate et les philosophes socratiques, je ne pourrai jamais vous remercier assez ! Dieu du ciel, comme ces choses sont dérisoires à mes yeux ! Mais après tout, j’adopte un plan de construction sur la suggestion et les conseils de Vestorius, qui convertira cette perte en un gain.
Cicéron ne semble absolument pas perturbé par cet incident et semble plus préoccupé par la reconstruction et le profit que par l’effet que cela a sur ses locataires. La facilité avec laquelle il parle de la question donne l’impression que l’effondrement de l’insula était courant au sein de la ville et qu’il n’y avait pas lieu de s’en inquiéter, du moins pour les propriétaires.
Nous pensons souvent aux constructions romaines pour les monuments, mais la reconstruction continue des insulae et le déblaiement des débris auraient ajouté à l’agitation et au vacarme de la ville et auraient été plus fréquents que la construction de monuments. Strabon dans sa Géographie mentionne les constructions incessantes de la ville dues à ces désastres :
…la construction de maisons, qui se poursuit sans cesse en raison des effondrements et des incendies et des ventes répétées (ces dernières, aussi, se poursuivent sans cesse) ; et en effet, les ventes sont des effondrements intentionnels, pour ainsi dire, puisque les acheteurs continuent à démolir les maisons et à en construire de nouvelles, l’une après l’autre, selon leurs désirs…. Or Auguste César s’est préoccupé de ces dégradations de la ville, organisant pour la protection contre les incendies une milice composée d’affranchis, dont le devoir était de porter assistance, et aussi de pourvoir aux effondrements, en réduisant la hauteur des nouveaux bâtiments et en interdisant que toute construction sur les rues publiques s’élève jusqu’à soixante-dix pieds.
D’après cette section de la Géographie de Strabon, nous pouvons imaginer le vacarme causé par les constructions constantes dans la ville et nous pouvons également en déduire que les incendies et les effondrements à Rome étaient suffisamment fréquents pour qu’Auguste ressente le besoin d’agir et que la République soit incapable ou non désireuse de contrôler les règlements de construction.
Gregory Aldrete décrit certains des défauts contribuant à ces désastres, notamment des planchers mal alignés en raison de problèmes de tassement et de fondation, des mélanges de mortier médiocres contenant une quantité insuffisante de chaux et des briques mal cuites et solubles dans l’eau. Ces matériaux moins chers auraient été plus susceptibles de se fissurer ou de se dissoudre dans un environnement humide. En examinant les murs d’insula de Pompéi, nous savons que dans de nombreux cas, « le noyau intérieur, qui devrait être une masse solide et imperméable de mortier et d’agrégats, n’est au contraire qu’un mélange grossier de gravats et d’argile qui, lorsqu’il est exposé à l’eau, s’effrite et se transforme en boue ». Ces matériaux de construction de mauvaise qualité auraient ensuite été recouverts de plâtre pour donner l’apparence d’une structure plus solide. Ainsi, l’absence d’insulae dans les archives archéologiques n’est pas seulement due au fait qu’elles étaient les victimes fréquentes de catastrophes urbaines, mais aussi au fait que la faible qualité de construction des insulae n’aurait pas traversé les âges et explique pourquoi nous avons des vestiges si rares aujourd’hui.
Catulle, XXIII, 8-10, http://www.perseus.tufts.edu/hopper/text?doc=Perseus%3Atext%3A1999.02.0003%3Apoem%3D23.
Juvénal, Satire III, lignes 190-204, http://www.fordham.edu/halsall/ancient/juv-sat3lateng.asp.
Aulus Gellius, Noctes Atticae 15.1.2-3 cité par Storey, « Meaning of Insula », 69.
Glenn Storey, « The Meaning of Insula in Roman Residential Terminology », Memoirs of the American Academy in Rome, 49 (2004), 57.
Cicéron, Ad Attica, 14.9, http://perseus.uchicago.edu/perseus-cgi/citequery3.pl?dbname=PerseusLatinTexts&getid=1&query=Cic.%20Att.%2014.9.
Strabo, V.III, 235, http://penelope.uchicago.edu/Thayer/E/Roman/Texts/Strabo/5C*.html.
Aldrete, 109-110.
Ibid, 109.